Thunder, la trilogie
Tonnerre (Thunder), Thunder II, le guerrier rebelle (Thunder II), Thunder III, Fabrizio De Angelis (Larry Ludman, 1983, 1985 et 1988)



Oeuvre du réalisateur-producteur Fabrizio De Angelis, la trilogie Thunder, aussi anodine puisse-t-elle paraître, forme un tout cohérent et indispensable à tout bon amateur de Mark Gregory, voire à tout être humain doué du libre arbitre. Pourquoi cela ? Thunder I, II et III ne forment-ils pas qu'un succédané de la trilogie Rambo ? Et bien non, et vous savez quoi ? Tonton Seetrouy va vous expliquer pourquoi.
Un univers cohérent
Tout d'abord, il convient de mettre les choses au point. Si le premier volet de la trilogie s'inspire de manière assez flagrante de Rambo premier du nom (un soldat revient du 'Nam et est persécuté par les autorités de son propre pays – une bonne raison pour reprendre les armes), tout en apportant quelques variantes (le soldat en question est un Indien, l'action se passe dans un ville en plein mileu du désert), les second et troisème épisodes ne suivent en revanche pas la trajectoire de leurs homologues stalloniens. En effet, les scénarios respectifs de Thunder II et III restent bien dans le même cadre que celui du premier.
Cohérence de lieu, mais également du ton. De Angelis, trop modeste pour ne pas se cacher derrière son pseudonyme habituel (Larry Ludman), tient également à traiter de thèmes aussi universels que la tolérance (Thunder et sa communauté indienne sont constamment persécutés par une certaine frange de la population blanche), la faillibilité de la justice américaine (les représentants de la loi ne sont pas tous des anges, cedont Thunder fait la triste expérience dans le second volet, qui le voit revêtir l'uniforme), et la violence (pacifiste, Thunder ne prend les armes qu'en dernier recours).
Deuxième preuve de la cohérence de l'univers de Thunder, certains personnages, outre notre Indien favori bien sûr, reviennent régulièrement au fil des films, tels des De Marsay ou des Vautrin adeptes des grandes étendues désertiques et des Indiens respectables.
En outre, et c'est surtout là que se situe la force et la cohérence de la trilogie, c'est dans le personnage de Thunder qu'il faut voir le principal atout de la saga.
Thunder, entre icône et souffre-douleur
Cela a beau sonner comme un cliché éculé, mais Mark Gregory EST Thunder. Aucun acteur autre que le charismatique et viril Gregory n'aurait pu retranscrire avec plus de talent le caractère complexe et empli de zones sombres du personnage. Car Thunder n'est pas qu'une brute capable de semer la zizanie dans une ville à lui tout seul (ce qu'il ne manque pas de faire dans chacun des trois films). Au contraire, sous ses apparences de brave et inflexible guerrier indien se cache un être sensible, constamment déçu dans sa foi au genre humain. Thunder est en effet un pacifiste effrenné, parfois timide, comme en témoigne son mutisme quasi-constant (même lorsqu'il a des revendications à effectuer – cf Thunder premier du nom), qui ne se révolte qu'après avoir subi toutes les humiliations possibles (en vrac : tabassé, traîné dans une voiture, arrêté comme un simple vagabond, témoin de la destruction d'un traité indien par un représentant des forces de l'ordre dans le premier volet ; pendu à un hélicoptère, considéré comme un moins-que-rien par ses collèques policiers, sans parler du viol de sa femme dans Thunder II ; enfin, fouetté jusqu'au sang, témoin du meurtre d'un poulain, du saccage d'un campement indien, puis encore traîné par une voiture, floué par la justice, et traqué tel un animal dans l'ultime opus – j'en oublie sans doute).
Reprenant ainsi les codes du western ou du film d'arts martiaux, le héros n'use de la force que poussé à bout. Cette force, le terrible Thunder l'use de différents moyens : destruction de bâtiments au bulldozer, usage de l'arc, des flèches, et du bazooka, et même destruction du bien d'autrui (il faut voir Thunder en nemesis foudroyante, affublé de lunettes noires, sans doute afin de cacher l'expression méduséenne de son regard, saccager à coups de barre à mine le magasin d'un vilain capitaliste). Vengeur inssaisissable, l'Indien devient donc une machine à tuer lorsque les rouages de la justice toussotent dangeureusement.
En résumé, la trilogie Thunder est un jalon essentiel du cinéma bis, au même titre que le dyptique des Guerriers du Bronx, c'est dire la portée de l'oeuvre. On notera, outre toutes les qualités énumérées, une superbe photographie de Sergio Salvati (chef-opérateur fétiche de Fulci) dans le premier volet, et les présences hautement appréciées du grand Henry Silva, de Bo Svenson, de Raimund Harmstorf, d'Antonio Sabato, John Philip Law et Werner Pochath ! Indispensable !